Formation et insertion
11 mars 2016

Réussir Vendée, un parcours pour les décrocheurs

Destiné aux jeunes décrocheurs de 16 à 25 ans, Réussir Vendée alterne stages en entreprise et temps de formation afin de les remettre sur la voie de l’emploi. Un dispositif original, entièrement financés par des entrepreneurs locaux.

Rencontre jeunes - entrepreneurs

Avant leur premier départ en stage, les jeunes rencontrent certains des
entrepreneurs qui ont financé le dispositif. ©Besnard/Apprentis d'Auteuil

C’est un dispositif tout à fait original qui a vu le jour en 2011. Inscrit au sein du Centre de formation continue Apprentis d’Auteuil Pays de Loire (1) dirigé par Leila Thomé, le dispositif Réussir Vendée (Montaigu, 85) est né de la volonté de cinq chefs d’entreprise locaux de tendre la main aux jeunes en très grande difficulté d’insertion, bientôt rejoints par une quinzaine d’autres entrepreneurs. Pour le monter, ils ont créé une fondation abritée par Apprentis d’Auteuil, aidés par Christophe Langlais, responsable du mécénat. Chacun s’est engagé sur trois ans selon ses possibilités. 
Aujourd'hui, juste avant le départ en stage, le dispositif a invité les entrepreneurs mécènes à rencontrer les jeunes : Patrick Padiou, directeur d’une PME spécialisée dans les extensions de maison, Joël Soulard, pdg des Canards Ernest Soulard, Simone Bougro, fondatrice de la Sodebo. Chacun se présente.
Autant de jeunes, autant de parcours singuliers, de projets et de rêves. Ou parfois, d’absence de projet.  Antoinette Lefebvre souligne : « Mon vœu, c’est que vous ayez tous une solution dans cinq mois et demi, quand la session s’achèvera. » Patrick Padiou, le premier à avoir lancé le dispositif, leur lance : « Notre projet, c’est que vous réussissiez dans la vie. Ici, vous allez avoir tous les outils pour être orienté dans la branche que vous souhaitez. » Joël Soulard enchaîne : « Derrière des noms d’entreprise, il y a des hommes et des femmes qui ont parfois débuté de rien. J’ai commencé comme chauffeur dans l’entreprise. Je me levais à 2 h du matin pour transporter les canards. Vous allez y arriver, quelque soit votre niveau si vous le voulez vraiment. » Simone Bougro renchérit : " On se forme tout au long de sa vie. Moi, j’ai commencé avec mon mari charcutier traiteur il y a 53 ans. On n’avait rien. Un chef d’entreprise, ça doit aussi donner l’envie de travailler ensemble. "

 

Une pédagogie de l'échange

Nathalie Girard, formatrice sur le volet professionnel, reprend des notions
avant le stage. ©Besnard/Apprentis d'Auteuil


En février 2012, la première session s’ouvrait à 15 jeunes. Fin 2013, plus de trente entrepreneurs s’étaient engagés auprès de Réussir Vendée. Au programme, une alternance de stages en entreprise (8 semaines) répartis sur cinq mois et demi de temps de formation, à destination de jeunes qui ont dépassé l’âge de 16 ans, fin de l’obligation scolaire. La plupart ont été orientés par la mission locale, certains par le bouche à oreille.  
« Cette session, la troisième depuis la création de Réussir Vendée, rassemble cette fois un public très jeune, explique Leila Thomé. 10 d’entre eux ont moins de 18 ans. Ils sont parfois difficiles à canaliser. Deux ont été exclus dès les débuts en raison de leur comportement agressif. Nous avons peu de temps pour agir : il faut donc que chacun s’investisse et soit acteur de son parcours. Nous mettons en place une pédagogie fondée sur l’échange. Nous développons plusieurs modules : orientation professionnelle, recherche d’emploi et de stage, savoirs de base, sport. Enfin, un atelier slam qui développe la créativité. »
Ce matin-là, Gwenaël Peron, formateur dans les compétences clés, fait travailler chacun en maths et en français, en fonction de résultats aux tests d'évaluation : « Le niveau est disparate. Fin de collège, fin de CAP, pour certains, niveau de primaire. En ce début de session, je découvre les jeunes. L’objectif est de repérer les difficultés de chacun pour travailler avec eux de façon à varier les dynamiques et les temps d’autonomie. Souvent fâchés avec le système scolaire, certains sont en refus sur tous les contenus. Cela déclenche chez eux trop d’émotion. Ils ont besoin de concret pour raccrocher aux apprentissages. »

Niveaux de langage

La fin de la matinée s’achève pour le groupe entier sur le thème des différents niveaux de langage. « Vous allez partir en stage en entreprise lundi. Il faut que vous fassiez attention au langage que vous allez employer. Qui peut m’en parler ? » Mathieu se lance : « Il y a le langage familier, le langage courant, le langage soutenu et aussi le vieux langage. » « C'est-à-dire ? » « « Le patois vendéen ! »
La conversation se poursuit sur ce que l’on dit, ce que l’on ne dit pas, et à qui. Un thème également repris l’après-midi par Nathalie Drouin, formatrice et référente sur le volet projet professionnel et techniques de recherche d’emploi.
« Une entreprise a aussi la mission sociale d’aider les jeunes, conclut Joël Soulard. Nous avons ici affaire à des jeunes perdus dans leurs propres codes de vie. L’idée du dispositif était de leur ouvrir la porte pour leur remettre le pied à l’étrier. » « C’est aussi une histoire de confiance en soi, reprend Simone Bougro. C’est un élément essentiel de la réussite. »